Le 13 Mai 1958
(Historia de Mai 1959)


Une journée qui aurait pu tout changer



Il y a un an, les événements d'Algerie ouvraient pour la France une nouvelle période d'ou allait
naitre la V° République.
Les Auteurs des " 13 complots du 13 Mai 1958 " (Fayard), nous décrivent la journée essentielle
du 13 mai, point de départ de la Révolution qui allait amener le général de gaulle à prendre en main le destin du pays et brader l' Algerie en 1962.







Le 13 Mai 1958



A Alger,   un soleil de printemps qui n'a rien d'écrasant baigne la ville,   ce matin du 13 mai,   les journaux du matin ont publié avec l'annonce de la manifestation,   un ordre de grève impératif du Comité de Vigilance :

Il est entendu que l'ordre de grève à partir de 13 heures s'applique rigoureusement à tous les établissement publics.
(administration,restaurants,cafés,cinémas,industries,commerces,travaux publics et privés)....


Pour ceux d'ailleurs,   qui n'auraient pas compris,   des coups de téléphone commminatoires seront donnés des 1 heure de l'aprés-midi,   meme au hotels dont les restaurants n'ont pas d'entré sur le rue.

Des petits groupes seront prets à intervenir brusquement pour faire respecter le mot d'ordre.
Le Comité de Vigilance créé par Léon Delbecque,   qui réunit les conjurés de tous genres,   se rassemble de bonne heure ce matin,   au centre des Républicains Sociaux,  40, rue d'Isly.

Delbecque, Neuwirth arrivés la veille de métropole, Vinciguerra, prennent la parole.
Ils font approuver la doctrine de la manifestation  :
    réclamer un gouvernement de Salut Public présidé par le général de Gaulle.

Mais pour la première fois,   ils laissent entendre qu'il est possible qu'en fin de journée interviennent des événements décisifs.

Les anciens de la Résistance,   des S.A.S.,   les jeunes Anciens Combattants,   qui sont dans le jeu de Delbecque,   approuvent.

Le Groupe des Sept, c'est-à-dire les étudiants, les poujadistes et les activistes de Martel,approuvent aussi.
Personne ne se doute encore dans la salle qu'ils ont prêté serment la veille au soir de prendre d'assaut le G.G. dans l'après-midi et qu'ils s'apprêtent à coiffer les gaullistes au poteau.

En revanche,   un certain flottement se manifeste chez les radicaux,   les Indépendants,   et chez les vieux Anciens Combattants qui commencent à se demander où l'on veut les entraîner.

On perd du temps en tergiversations,   si bien que l'organisation de la manifestation,  le minutage du défilé ne sont pas étudiés.

On décide seulement de se trouver au début de l'après-midi au journal   "Le Bled",   organe de l'armée,   dont les fenêtres donnent sur le boulevard Laferrière,  tout près du monument aux Morts.
      - Ce sera le P.C. du Comité de Vigilance.

Pour Delbecque et ses amis,   l'objectif est de faire durer la manifestation tard dans la nuit,   jusqu'à l'arrivée de Soustelle et jusqu'au scrutin de l'Assemblée.
Et de la porter à un degré de chaleur suffisant pour que si Pflimlin est investi, l'explosion se produise, qui emportera les édifices publics à Alger et le régime à Paris.

Pour les Sept, qu'animent Lagaillarde, président de l'Association des Etudiants et
Martel, un viticulteur, chef de la Société Secrète, l'U.F.N.A. (Union française nord-africaine),   il en va différemment.
Ils se sont retirés de la réunion du Comité de Vigilance sur la pointe des pieds et se retrouvent à 11 heures à l'Association des Etudiants.
On confirme le plan arrêté la veille. Il s'agit de gagner les gaullistes de vitesse pour les empêcher de constituer leur directoire qui écarterait le général Salan.
On attaquera le G.G. dès que les généraux auront déposé leur gerbe au monument aux Morts.
Le désordre sera tel que l'armée sera contrainte de prendre immédiatement le pouvoir.
Cependant, Martel est désemparé. Il attendait le général Cherrières, ancien commandant en chef en Algérie, de l'organisation "Grand 0 ", qui devait prendre la tête des opérations.
  -  Quand nous serons au G.G., nous n'aurons pas de patron! dit Martel angoissé.
  -  On se débrouillera ! lance Lagaillarde.
  -  Quand nous aurons pris le Gouvernement Général, l'armée sera bien obligée de prendre le pouvoir !


A 13.h 45, Martel se rend au bureau du colonel Thomazo. Il faut au moins que l'Armée soit prévenue.
  -  Morts ou vivants, annonce-t-il à Nez-de-Cuir, à 18 heures nous serons dans le G.G.

L'intrépide colonel, qui n'avait pas pris au sérieux le serment de la nuit précédente, entre en fureur.
  -  L'armée vous tirera dessus, dit-il.
  -  Vous perdrez l'Algérie avec votre folie!
  -  Vous ne pouvez pas nous tirer dessus.
  -  Et, au moins, vous aurez été prévenu!
  lance Martel en se retirant.
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