Le massacre du village de Palestro
le 22 Avril 1871
Ce massacre,
- c'était le mot à la mode, en 2012, n'aurait sans doute jamais été dénoncé,
sans un sénateur, s'élevant devant une loi d'amnistie des Arabes, après les évènements de 1871.
- Je cite le Sénateur :
« Tous les vrais Algériens,
regrettent que le Général Arnaudeau, en retirant son amendement, ait ravi au Sénateur de notre département,
l'occasion de porter à la tribune française, le sanglant tableau de cette boucherie.
Notre sénateur avait promis le récit complet du massacre de Palestro, on s'est hâté
de lui fermer la bouche. »
Note :
- depuis que cette ancienne régence ottomane, porté le nom d'Algérie,
les narrateurs utilisaient le mot Algérien pour nommer les Français et Européens présent en Algérie.
- Ces quelques pages résument,
ce que le Sénateur aurait pu dire, avec plus d'éloquence et plus
d'autorité que moi, mais non,
avec plus de sincérité et d'exactitude.
Journées des 21 et 22 Avril 1871.
- Il n'est plus besoin de reproduire ici, les cause qui amenèrent la terrible insurrection de 1871.
- La nouvelle de nos désastres,
s'était rependu dans toute l'Algérie, dans les tribus et même dans les villages les plus éloignés,
le moment semblait choisi,
pour une révolte générale, des émissaires parcouraient en tous sens la Kabylie.
- Le petit village de Palestro était en plein dans le mouvement.
Carte de la region d'Alger.

- Les populations indigènes des environs du village,
étaient travaillés sourdement par les affiliés des sectes religieuses du pays et par des gens venus, on ne sait d'où.
- Ce village de nouvelle création,
il avait moins de trois ans d'existence, sans réduit défensif, restait ouvert à toutes les entreprises des révoltés.
Il se composait, de quelques familles Italiennes et Autrichiennes,
concessionnaires du sol, mais surtout de journaliers célibatairesun centaine de personnes en tout.
Le Maire, M. Bassetti,
que les Arabes accusaient à tort ou à raison d'exactions, était désigné par eux, comme la première victime.
- Quelques jours avant le massacre,
les habitants avaient bien remarqué une certaine effervescence et les allures suspectes des Indigènes, leurs voisins,
mais confiants, ils n'avaient pris aucune précaution.
- La brigade de gendarmerie,
composée du Brigadier Zaepfell et de quatre gendarmes, constituait la seule défense de ce village.
- Dès, le 21 Avril 1871, des groupes menaçants,
se rassemblaient dans les rues et proféraient
des menaces de mort contre le Maire Bassetti.
- Une panique s'ensuivit parmi les Européens, le soir même,
hommes, femmes et enfants, se réfugiaient dans trois bâtiments, le Presbytère, la Gendarmerie,
et la maison cantonnière, qui par leurs dispositions et leurs enceintes crénelées pouvaient seuls
être défendus.
La force armée se composait d'une Brigade de gendarmerie, et des armes individuelles des colons.
- La nuit noire et pluvieuse, permit à quelques habitants, (trois),
de s'esquiver sans bruit pour ce rendre à Alger, un de ceux-ci fut tué, un autre dépouillé de tous ses vêtements, puis tué,
le dernier, plus heureux pu rejoindre le village de Fondouk, situé à 30 kilomètres, où, il y arriva exténué.
- A Palestro, la population se préparait à combattre.
Extrait du jugement du 24 Août 1877.
- Le Presbytère renfermait quinze colons, pendant la nuit,
les insurgés, après avoir incendié les habitations particulières, amoncelèrent sans bruit des faix de paille,
devant la façade du bâtiment et y mirent le feu, ce qui obligea les défenseurs à sortir, avant de mourir enfumés.
- Ils traversèrent en courant l'espace, qui les séparait de la Gendarmerie,
environ cinquante mètres, sous les yeux des insurgés surpris par cette manœuvre.
- Vers 9 heures du matin,
au milieu du tumulte et des imprécations d'une multitude de 12.000 Indigènes, la plupart armés,
le Maire, M.Bassetti, le Curé Mouginot et le brigadier Zaepfell, s'avisèrent de parlementer avec les Chefs,
dont ils étaient les mieux connus.
- Ils se présentèrent aux fenêtres du premier étage et parlementairent pendant quelques minutes,
avec les chefs des insurgés, d'un commun accord, on convient de déposer les armes, avec cette condition :
Les Européens, sous la foi du serment,
seraient conduits à l'Alma, où se trouvait la colonne commandée par le Colonel Fourchault.
- Que se passa-t-il exactement ?
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
- Les trois seuls survivants de la caserne, ne s'accordent pas bien sur ce point,
car, on ne sait par quel miracle, ils purent atteindre la maison cantonnière :
« Les portes de la gendarmerie s'ouvrirent,
et les premiers malheureux désarmés, se précipitèrent au milieu de leurs futurs bourreaux,
ils n'ont pas le temps de faire deux pas,  comprenant leur méprise,  Le Maire,  le brigadier Zaepfell,
le Curé Mouginot firent d’héroïques efforts pour tenter de refermer les portes.
Ils succombèrent sous le nombre, la caserne est envahie, tous les réfugiés partagèrent le même sort.
Ce fut pendant une heure, une effroyable boucherie. »
- Une fois les occupants de la caserne exterminés,
les insurgés se portèrent sur la maison cantonnière, où, quelques braves, dont un, Jacobi Trentini,
qui vivait encore à Palestro, en 1889, tinrent tête aux insurgés, en tirant du haut de la terrasse.
- Mais la porte de l'enceinte murée céda sous les efforts de cette masse,
les colons se réfugièrent dans les étages supérieurs, puis retirèrent l'échelle qui donnait accès aux dites étages.
- Dans leur fureur de ne pouvoir les atteindre,
les forcenés amassèrent toutes les matières combustibles qu'ils purent trouver et les accumulèrent à l'intérieur,
un incendie formidable ne tarda pas à se déclarer.
- Heureusement, la voûte de la terrasse était solidement construite, les barres de fer résistèrent.
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
- Mais, les assiégés décimés,
mais surtout épuisés par la soif, se rendirent, en abandonnant le cadavre d'un jeune enfant de 12 ans.
- Il y eu encore quelques scènes de sauvagerie, surtout envers les hommes,
mais, un chef influent, pris sous sa protection les prisonniers de tout âge et de tout sexe.
Ils furent emmenés dans une tribu isolée,
du douar des Beni-Khalfoun, s'attendant à chaque instant à être massacrés par leurs fanatiques gardiens.
- Pourquoi, ce chef influent a-t-il sauvé, puis protégé les prisonniers ?
Il faut ici constater que :
- La rapidité de l'intervention des troupes du Colonel Fourchaut,
qui s'étaient mises en marche, quelques heures après l'arrivée du rescapé à Fondouk. - Les rapides succès de la colonne commandée par le Général Cerrez.
- La mort du fameux Chef Mokrani, lors du combat de l'oued-Soufflat.
- La vitesse du téléphone arabe, signalant les rapides succès des français.
Ont sans aucun doute, influencé le chef de tribu,
qui prévoyant de justes représailles, considéra dès lors ses prisonniers comme des otages.
- On peut affirmer, sans crainte, tous l'ont répété et le répètent encore,
que si nos troupes eussent subi un échec, c’en était fait des prisonniers.
- Deux mois après, les malheureux veufs, veuves ou orphelins étaient, au nombre de 45, remis aux mains des nôtres.
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
La boucherie.
- Qui pourra dire les tourments endurés,
par ces cinquante-cinq victimes, dont les corps, honteusement mutilés, reposent dans une fosse commune,
sous le mur Est de la façade de l'église, sous une couche de chaux, là, où leurs débris ont été enterrés à la hâte !
- Un monument commémoratif,
a été élevé à leur mémoire par souscription publique et à quelques pas du petit cimetière.
Un groupe le surmonte et représente un colon de la première heure, la poitrine découverte,
les bras nus, tenant un fusil et défendant sa famille affolée à ses pieds, dans l'attitude du désespoir.
- Sur le façade sud,
on lit les noms reproduits ci-après, ainsi que sur les registres de l'état-civil :
1°) - Zaepfell Etienne, Brigadier de gendarmerie, 38 ans
2°) - Chiarelli Jacques-Toussaint, gendarme, 42 ans
3°) - Matteï Bernadin, gendarme, 37 ans
4°) - Paoli Jean-Antoine, gendarme, ex-sergent au 1° tirailleur, 30 ans.
5°) - Rollin Nicolas, gendarme, 35 ans
6°) - Bassetti Dominique, Maire et négociant, 43 ans
La tête du Maire a été retrouvée dans les lieux d'aisances, le corps a été haché par morceaux.
En 1889, au village, on voyait encore, une poutre sciée et ensanglantée, qui aurait servi pour cette usage.
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
7°) - Mouginot Charles, Eugène curé, 45 ans
Retrouvé éventré, avec les parties sexuelles dans la bouche.
8°) - Adami Jacques, peintre 33 ans
9°) - Balmelli Jean, maçon 31 ans
10°) - Balzarini Gaëtan, briquetier et cultivateur, 28 ans
11°) - Balzarini Noël, briquetier et cultivateur, 23 ans
12°) - Barbitta Gélade, cordonnier 26 ans
13°) - Bassetti Emmanuel, frère du Maire, âgé de 29 ans,
14°) - Bianchi Mathieu, journalier, 26 ans
15°) - Brochi Joseph, maçon, 34 ans
16°) - Bruno Charles maçon, 27 ans
17°) - Calderari Hercule, maçon, 22 ans
18°) - Calanchini Charles, maçon, 21 ans
19°) - Capponi Charles, maçon
20°) - Christi Antoine cultivateur, 23 ans
21°) - Boira Francisco journalier, 40 ans
22°) - Degord Briquetier
23°) - Dieulouard entrepreneur, 38 ans
24°) - Di Givioni Dominique, domestique, 33 ans
25°) - Durchéfle, menuisier, célibataire,
26°) - Folelli Pierre maçon, 48 ans
27°) - Gagliardi Jean, , mineur, 28 ans
28°) - Gasti Pierre Débitant de boisson, 42 ans,
29°) - Geronimi, Autrichien du Tyrol, sans renseignement officiel
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
30°) - Guichard Charles Louis, né à l'Alma, 27 ans, célibataire
31°) - Hanoun Abraham épicier, 27 ans célibataire
32°) - Jacquin Jacques François, sapeur au 2° régiment du génie, 27 ans
33°) - Lèpori Virgitti Raimondi, maçon, 22 ans célibataire
34°) - Magnan Jean-François Cantonnier auxiliaire
35°) - Martin Antoine, sans profession, 35 ans, né à Alger
36°) - Mayoral Marcellin cultivateur 40 ans
37°) - Mazziéri ou Marcer François, forgeron 30 ans
38°) - Paris ou Parizzi Louis mineur, âgé de xx
39°) - Pierré sans renseignement français
40°) - Rimet facteur 21 ans
41°) - Roda Louis, cultivateur et charretier, 32 ans
42°) - Rossi Charles, journalier, 24 ans, célibataire
43°) - Segarra Joseph cultivateur, 20 ans
44°) - Vicente Seguy y Solbès, Cultivateur 40 ans
45°) - Théodore Claude ancien soldat du génie, garçon d'écurie, 32 ans
46°) - Toumazi Gaëtan garçon de débit, 40 ans
47°) - Vanoni Félix, maçon, 33 ans célibataire
48°) - Bombart Marguerite, femme Bresquée, décédée au village de l'Oued Hamieh, douar des Beni-Khalfoun, le 24 avril 1871.
49°) - Leret Jacques, cantonnier, 47 ans, marié
50°) - Femme vivant chez M. Leres, à Palestro, sans que l'on puisse affirmer, si c'était comme épouse ou comme domestique.
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
51° - 55°) - sur la stèle figure également :
Cazanove, maçon, et quatre inconnus, européens ou français, enterrés dans la fosse commune,
pour lesquels, on n'a pu donner d'information sur leurs identités.
Epilogue :
- Le 24 Avril 1971, la colonne du Colonel Fourchaut, accourue au secours
des malheureuses victimes, elle découvre le corps calciné du jeune enfant de 12 ans, pupille du Curé Mouginot,
frappé d’une balle au front, son corps adhérant au plancher de la terrasse de la maison cantonnière,
il fut recueilli par les soldats, ainsi que les cinquante-deux autre victimes du village.
- Un des frères Balzarini a été tué le 21 Avril dans la journée, au village.
- La femme inconnue, qui vivait avec le sieur Levet,
a été assassinée, le 21 Avril et retrouvée le 24 avril dans un ravin, elle devait avoir environ 47 ans.
- La veuve de Mayoral Marcellin, et ses trois enfants, vivaient encore à Palestro, en 1889.
- La veuve de M. Roda Louis, vivait également à Palestro, en 1889.
Extrait du jugement du 24 Août 1877 (suite)
- Je laisse la conclusion au Sénateur auteur de cette notice sur le Massacre de Palestro, le 22 Avril 1871 :
« Trois des chefs de village,
furent condamnés à morts, plusieurs autres, aussi coupables, mais moins compromis, furent internés à la Nouvelle-Calédonie,
puis en Corse, même en Avignon.
La plupart ont été graciés et sont revenus plus insolents que jamais.
Ceux-là, n’ont rien appris peut-être, mais n’ont rien oublié, c’est certain.
Il serait donc insensé, de s’endormir dans une tranquillité trompeuse,
que la France montre sa faiblesse, et on verra se renouveler, certainement ces scènes de carnage.
Un observateur l’a dit :
« Jamais, un chrétien et un musulman cuits dans la même chaudière, ne pourront faire un bouillon. »
Palestro, le 22 Juillet 1873.
Note :
Malheureusement, je n’ai pas le nom de l’auteur de cette notice de 1873,
éditée, à Blida, dans l’imprimerie administrative A. Mauguin, en 1889.
Palestro Stèle du massacre du 22 avril 1871
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