Les Paras prendront-ils Paris ?


Le Mois de Mai 1958


Les C.R.S. sont les éléments qui donnent le plus de souci au général Miquel.
Les paras sont enthousiastes.
Mais les C.R.S. trépignent d'impatience et leurs officiers ont toutes les peines du monde à les empêcher d'entrer en action avant le jour J.

Ils ont tous dans leurs poches des morceaux de craie pour mettre des croix de Lorraine sur leurs casques et leurs camions.

Au matin,   le général Miquel, commandant en chef de l'action en métropole, doit aller en hélicoptère, avec le général Massu, chercher le général de Gaulle à Colombey pour le ramener à Paris.

Cela est dans leurs projets.   Mais l'accueil qui les attend risque d'être très différent de celui qu'ils escomptent.
L'opération tout entière doit se dérouler l'arme à la bretelle, sans un coup de feu.

On ne prévoit que des noyaux de résistance très isolés au siège central du parti communiste et dans quelques coins de banlieue.
Les arrestations prévues ne sont d'ailleurs que des «neutralisations» momentanées, sans violence et ne doivent pas être maintenues.


Aux premières heures de la journée, le chef des opérations à Paris, qui doit être le général de Beaufort, fera relever les unités de paras par des troupes régulières des régiments d'instruction.
La majeure partie des paras enrégimentés seront regroupés pour recevoir éventuellement une nouvelle mission.   On peut avoir besoin d'eux en province.
Si-non, ils rentreront en Algérie au plus vite.
A Lyon, à Bordeaux, à Dijon, à Marseille, en Bretagne, les préparatifs ont été faits.

Le général Salan a gardé sous son autorité personnelle les opérations éventuelles de l'armée française en Allemagne.
En cas de besoin,   des éléments blindés de l'armée d'Allemagne subsistant des divisions atomiques démontées pour la guerre d'Algérie franchiront le Rhin et prendront position dans la région Nord-Est,   «  la  France utile »,   selon l'expression du ministre de l'Intérieur,   où l'effervescence ouvrière est supposée pouvoir être la plus vive,   coupant la route au gouvernement que M. Jules Moch songe à replier vers Lille.

Le ministre de la Défense nationale,   M. de Chevigné, se refuse encore, ce 27 mai, à prendre au sérieux le plan Miquel-Salan.
  -   Les généraux sont trop intelligents,   répète l'ancien colonel de spahis,  
  -   pour se lancer dans cette folie.

Jules Moch se laisse intoxiquer ...

Cependant, il convoque ce jour même le général Miquel. Celui-ci demande un avion militaire pour le conduire à Paris. On le lui envoie au début de l'après-midi.

Au ministère de la guerre, il est reçu fort courtoisement par le ministre.
  -   Je comprends les sentiments des officiers d'Algérie,   lui dit M. de Chevigné.
  -   Mais un putsch en métropole ne conduirait l'armée et le pays qu'au désastre et à la guerre civile.

Une demi-heure plus tard,   il raccompagnera son visiteur et lui serrera la main.
Il ne lui aura posé aucune question.   Peut-être M. de Chevigné ne savait-il pas le commandement clandestin confié au général Miquel.
Le président du Conseil l'ignorait totalement en tous les cas.

Seul avec Guy Mollet,   Jules Moch parait avoir été pleinement conscient de la menace suspendue au-dessus du régime.   Mais il fit peu de confidences pour ne pas saper le moral de ses collègues.

Ses confidences,   M. Jules Moch en faisait surtout profiter son chef de parti. M. Guy Mollet passait ces journées d'angoisse auprès de lui,   place Beauvau.
Déconcertante intimité que celle de l'initiateur du dialogue avec de Gaulle et du leader de la   «  résistance  républicaine  ».

Les deux hommes avaient besoin de se convaincre mutuellement.   Mollet voulait entrainer Moch vers de Gaulle.   Moch ne pensait qu'à retenir Mollet.

Mais tous deux essayaient d'organiser la résitance aux factieux.

Guy Mollet convoque à l'Intérieur les leaders des grands syndicats Force Ouvrière.
Notamment des cheminots.
  -   Il faut,   leur dit-il,   organiser la grève des chemins de fer en cas de débarquement des      parachutistes pour interdire leur transport.
  -   Les parachutistes prennent rarement le train !   observe un syndicaliste.
  -   Il faut couper les routes pour interdire leurs déplacements par camions !
  -   Si vous n'avez que les prolétaires,   pour les envoyer au casse-pipe,
  -   vous n'aurez pas grand monde! rétorque un autre leader ouvrier.



Les Parachutiste sur les toits de la Préfecture d' Ajaccio
Le 24 Mai 1958     Opération   « Résurrection ».


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