Le drame de Mers-El-Kébir
le 3 Juillet 1940.
La Provence risposte !
- Le signal d'appareillage
qui battait au vent depuis vingt-cinq minutes s'affala
brusquement sur la passerelle du Dunkerque.
Les chaînes filèrent avec un grand
vacarme tandis que les haussières tombaient à l'eau à l'arrière
en glissant comme des serpents en furie.
25 à gauche ! En avant demi !
- Le magnifique cuirassé se mit à vibrer de toutes ses membrures,
tandis que les tourelles avant bloquées sur butée attendaient pour tirer de voir apparaître leur objectif.
- La salve du cuirassé Resolution
tomba courte de quelques dizaines de mètres, faisant jaillir d'immense colonnes d'eau,
mais celle du Hood qui suivit à quelques secondes, explosa dans un tonnerre sur la jetée,
projetant un déluge de pierres sur les plages arrière où se trouvaient encore en plein découvert
les équipes de manœuvriers qui couraient rejoindre leur poste.
- Le tir des Britanniques est maintenant réglé.
La salve du cuirassé Resolution.
- La troisième salve
tombe en plein sur la ligne des navires qui ont tous mis leurs machines en avant.
- Trois obus de 380 touchent Le Dunkerque,
incendiant les munitions d'une des
tourelles et mettant hors de service deux des machines principales.
- Deux projectiles atteignent La Bretagne qui commence à peine à décoller du quai.
Une immense colonne de flammes s'élève entre les deux mâts.
Les soutes de la tourelle 3 ont explosé.
- Le malheureux bateau
dont les machines tournent encore avance pendant quelques minutes,
puis touché par de nouveaux projectiles, prend de la gîte et chavire brusquement.
La Rade en flamme.
Au premier plan La Provence, à côté Le Strasbourg filant vers la passe, au centre La Bretagne en flamme.
- Dans la terrible situation où se trouvent les navires,
seuls les directeurs de tir peuvent du haut des mâts tripodes, observer l'ennemi.
Tous les autres membres de l'équipage attendent leur destin comme des captifs dans les oubliettes,
sans autre écho de la bataille que le grondement assourdissant des départs de coups et l'ébranlement
monstrueux des explosions de projectiles.
- Dès la première salve anglaise, La Provence a ouvert le feu.
Son directeur de tir, le lieutenant de vaisseau Cherrière, sans attendre que le bâtiment soit dégagé,
a lâché sa bordée par dessus le Dunkerque, mais son navire est à son tour touché.
Un nuage de vapeur, sortant des compartiments des chaudières, enveloppe le télépointeur.
Le tir se poursuit cependant dans les éclaircies en même temps que celui du Dunkerque dont les pièces
avant sont enfin battantes et rattrapent le temps perdu à une cadence forcenée.
- Après la dixième salve de la Provence,
l'ogive d'un obus ayant ricoché sur une tourelle du Dunkerque,
vient percuter la tourelle de télépointage, et arrache la jambe du directeur de tir.
- Deux servants le descendent le long de l'échelle qu'il inonde d'un flot de sang.
Il a eu la force, avant d'expirer, de dire à son adjoint du blockhaus :
La Provence en flamme.
- Mais il n'y aura pas de suite.
De nouveaux coups ont touché la Provence dont les circuits électriques sont hors d'usage.
Le bâtiment est envahi par l'eau.
Profitant de l’erre qui lui reste, son commandant va s'échouer entre Roseville et Sainte Clotilde.
- Peu après le Dunkerque,
à nouveau touché, suspendait le feu à son tour et allait mouiller devant Saint-André.
Cessez le feu.
- Dans cet océan de misère, une nouvelle vient apporter un peu de baume à bord du navire amiral,
le Strasbourg, qui placé le plus près de la sortie, a mis en avant toute dès la première salve anglaise,
a échappé de justesse à la seconde et, masqué par la forêt des gerbes immense, a réussi à embouquer la passe.
- A 17 h 9, l'amiral Gensoul,
estimant inutile de prolonger la tuerie, décide de hisser le pavillon carré qui, comme l'avait suggéré
Somerville, signifierait l'acceptation de ses propositions.
- Mais l'éventualité d'un tel signal n'ayant jamais été envisagée.
Il n'y a sur la passerelle du Dunkerque, aucun pavillon assez grand pour être aperçu des Anglais
à une si grande distance. Un timonier apporte une couverture... Elle est beige et rayée de blanc.
De crainte d'une interprétation déshonorante, personne ne veut la hisser.
L'amiral signale alors au Hood par radio :
Vous demande cesser le feu.
Le combat inégal.
- Ce signal était inutile.
- Le feu durait depuis treize minutes.
- Les explosions de la Bretagne et du Dunkerque et les vapeurs de la Provence avaient couvert la rade
d'une fumée si épaisse que les pointeurs de la Force H ne voyaient plus rien.
- Ils avaient tiré les dernières salves en tir décalé en visant le phare de la citadelle,
seul point de repère émergeant de la panne sombre sous laquelle agonisaient les bateaux français.
Mais un obus malencontreux venait d'abattre à son tour le phare !
- Somerville écœuré par ce jeu de massacre, prit prétexte pour suspendre le feu.
- Puis, comme les obus tirés par les batteries de côte commençaient à pleuvoir autour de ses bateaux,
blessant même de leurs éclats quelques hommes, il fit virer son escadre sur la gauche et rompit le combat.
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